Le 4ième facteur de résistance au changement que je souhaite développer ici est l’homéostasie du système.
L’homéostasie est un état d'équilibre dynamique, où “fixité du milieu intérieur” selon l’expression du physiologue C. Bernard. Un système donné à tendance à maintenir autour d’un niveau préfixé la valeur de certains paramètres intérieurs, qui sont continuellement perturbés par des facteurs internes et externes. Le fonctionnement global du système
a donc tendance à se maintenir en équilibre, autour d’une norme de fonctionnement. Dans notre cas, le système est formé par le patient/résident, les membres de sa famille et les membres de l’équipe soignante. Ce système va donc fonctionner et se maintenir selon des normes établies dés les premiers jours de l’hospitalisation ou institutionnalisation en fonction des interactions qui se réalisent entre les différents protagonistes du système.
En 1954, Don D. Jackson, psychiatre et psychanalyste, présenta ses travaux issus de ses interventions sur les systèmes des homéostasies familiales qui permit de définir que selon l’approche systémique, ce n’est pas que la famille soit déséquilibrée par un membre malade, mais l’équilibre familial repose sur la maladie de celui-ci et qu’elle tend à préserver comme telle. En d’autres termes, c’est le symptôme qui permet l’homéostasie de la famille.
Il nous paraît donc pertinent pour contourner une éventuelle résistance au changement de la part du patient/résident par rapport à son nouveau lieu de vie de prendre en considération l’homéostasie du système patient-famille-équipe soignante puis d’introduire une logique non ordinaire au sein du système qui intégrerait du changement là où le système serait naturellement prompt à maintenir l’équilibre.
Le recours à la logique non-ordinaire nous parait indiqué car la décision de ce changement de lieu de vie du patient/résident est souvent mal vécue et chargée émotionnellement. Or le patient/résident doit quitter un endroit chargé de souvenirs et d’affect, et c’est un lieu qu’il a investi durant des années voire toute une vie et qu’il/elle doit quitter pour s’installer dans un nouveau lieu. Il parait donc important de prendre en compte l’aspect affectif de ce changement et si l’on n’utilisait qu’une logique ordinaire de raisonnement purement cognitif pour obtenir l’adhésion au projet (institutionnalisation ou hospitalisation longue durée) du patient/résident, ce serait certainement vain.
Comme en thérapie systémique et stratégique il est important que le patient ressente que quelque chose doit changer et pas seulement qu’il se contente de le comprendre (Nardone et Salvini, 2012), la logique non-ordinaire va permettre de lui faire ressentir ce besoin de changement dans ses interactions avec la famille et l’équipe soignante et il sera plus à même d’accepter ce nouveau mode de vie.
En conclusion, plus on essaiera de raisonner le patient/résident, plus il/elle résistera à son entrée en Ehpad ou à l’hôpital non par parce qu’il/elle est non collaborant mais à cause de la qualité intrinsèque du système qui maintient l’équilibre. La logique non ordinaire permet de s’affranchir de cette résistance.
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